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ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE

Une conférence d'Anne Garde, dans le cadre de l’exposition L’Eternel dans l’instant, Andrée Putman au CAPC

En 1990, Anne Garde était invitée par Jean-Louis Froment, alors directeur du CAPC musée d'art contemporain de Bordeaux, pour réaliser une série de photographies sur les nouveaux aménagements du musée conçus par l'architecte d'intérieur Andrée Putman.Témoin privilégié de l’histoire du CAPC musée et de son aménagement, Anne Garde a porté au cours des années 1980 et 1990 un regard saisissant sur l’œuvre qu’Andrée Putman a déployée dans les espaces du CAPC. Il résulte de cette rencontre une série de photographies exceptionnelles, constitutives des archives du CAPC, et d’une grande force plastique. En écho à l’œuvre de la célèbre architecte d’intérieur, les photographies d’Anne Garde sont le fruit d’une personnalité forte, d’un regard sans compromis, d’une grande radicalité visuelle. A l’occasion de ce rendez-vous, la photographe évoquera sa rencontre avec Andrée Putman ainsi que différentes étapes de son parcours artistique.

« Je cherche à éclairer ce qui est resté dans l’ombre. L’ombre du souvenir, l’ombre du refoulé, l’ombre de l’histoire… » Anne Garde

S'appuyant sur une projection qui croisera un choix de ses photographies prises au moment du réaménagement du CAPC musée avec d'autres images jalonnant sa carrière, Anne Garde parlera de sa rencontre avec Andrée Putman fondatrice d’Ecart, dont il est bon de rappeler que le nom est un anagramme du mot trace.

L'architecte d'intérieur et designer qui aimait plutôt “jouer de l’espace que de l’objet” était fascinée par le grand vaisseau qu’est l'Entrepôt Lainé, ancien entrepôt réel des denrées coloniales — qui abrite le CAPC depuis 1973. En effet, de la lumière tombant des grandes ouvertures de l’Abbaye de Fontenay — où elle passe son enfance —, à celle se diffusant dans la Nef de l’Entrepôt Lainé, Andrée Putman, être solaire, placera tout au long de sa carrière l’éclairage, naturel ou artificiel, au cœur de ses réalisations.

La lumière, matière première du medium photographique, sert de lien et de révélateur entre la pratique de la designer et celle de la photographe. De la friche à l’architecture d'intérieur, de New York à Bordeaux et de Paris à Tokyo, Andrée Putman a su trouver des solutions élégantes en créant des formes pures et indémodables, en cherchant à bâtir un idéal de “beauté moderne”. De New York à Bordeaux Anne Garde affirme, au sujet de ses photographies, qu’elle entend “choquer par la beauté”. Et c'est justement à New York que les deux femmes se rencontrent en 1986, alors qu'Andrée Putman vient de terminer l’aménagement de l’Hôtel Morgans, devenu culte après son intervention. À cette même époque, Anne Garde est invitée à documenter les réaménagements du CAPC musée confiés précisément à Putman.

L’intensité des noirs et blancs de ses photographies rapproche naturellement Anne Garde des créations de Putman. En effet, l’utilisation inédite, et parfois cinétique, de ce même contraste dans les créations de la designer rejoint la recherche radicale de la photographe dans le portrait qu’elle fait, par exemple, d’un Bordeaux nocturne et filmique (Bordeaux la Lune, Eddibor1980).

Tentée également — à la façon d'Andrée Putman — par des expériences diverses et un éclectisme revendiqué, qui forment "les ingrédients différents d’une recette individuelle", Anne Garde découvre, au milieu des années 80, l’Inde, où elle entame un travail qui durera plus de 10 ans à la recherche des échanges culturels entre ce pays-continent et l’Europe (Salon Indien,Hazan 1996). Cet éblouissement va orienter son travail photographique vers la recherche de la “lumière lumineuse du Sud Ouest” chère à Roland Barthes.

C'est cette même lumière qu'elle introduira plus tard dans la Base sous-marine de Bordeaux, et dans d’autres lieux délaissés, créant des illusions d’espace (Extralight, Verlhac 2008), rejoignant ainsi encore une fois l'esprit d'Andrée Putman, dans le choix de ces friches, pour exprimer par le geste photographique le sentiment nouveau d’un “entre-deux” où le travail de mémoire s’allie à la passion du vide.

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Anne Garde vit et travaille à Paris. Elle est l’auteur d’une œuvre plastique novatrice explorant sur les sites industriels et les lieux de mémoire. Son regard montre un envers du monde occidental qui échappe et résiste à la globalisation, "une sorte de vérité somnambule" selon les mots de Michel Nuridsany. Architectures, villes, ports, usines, friches, bunkers, ponts, routes, intérieurs, nuits… sont des lieux de prédilection où ses interventions paradoxales par la lumière, les pigments de couleur et le feu expriment une tension lumineuse qui traverse aussi ses photographies noir et blanc. Cet univers de l’entre-deux est structuré par des installations monochromes qui sont la signature de l’artiste. En parallèle, les nouveaux mondes de l’Asie font partie active de son imaginaire qu’elle échange avec Laure Vernière, peintre et écrivain.


> Auditorium > Voie d'accès pour personnes handicapées > Tarifs : Entrée libre > Entrée libre Photo © Anne Garde

Bibliographie